Entretien avec un acrobate de l’image

Tu tentes d’améliorer l’esthétique depuis 40 ans. La partie est-elle gagnée ?
Kiki Picasso: L’ennemi est affaibli mais encore dominant. Si nos amis d’hier n’étaient pas devenus des artistes de galerie, des directeurs d’agences de pub, des cadres d’institutions culturelles, des chefs de produit de l’industrie du disque, des responsables d’unités de programmes télévisés, nous aurions déjà atteint notre but. Ce but était, et est toujours, d’augmenter jusqu’à l’outrance, la sensibilité, voir la sensiblerie. Jusqu’à la cassure pour accélérer la fuite en avant.
Vers où?
Kiki Picasso: Vers le futur et sa moisson d’étoiles.
Nous n’avons plus le temps de protéger notre écosystème. Carbonisons nos dernières ressources pour quitter au plus vite la planète.
Quoi faire tout de suite ?
Kiki Picasso: On supprime toutes les frontières. C’est des dessinateurs qui les ont tracées. Je n’arrive pas à donner du sens à ces lignes malveillantes, uniquement animées par un esprit conquérant et sécuritaire. Le pire, c’est de voir que les gens semblent toujours prêts à défendre des espaces cartographiés par des pointillés. En ce qui concerne la France, il n’y a aucune raison de laisser le bleu, le blanc et le rouge à ces cons de Français. Là, sur ces points précis, il y du travail pour l’année à venir.
Quelle sera ta technique ?
Kiki Picasso: J’utilise les images, toutes celles qui m’influencent, m’inspirent, me séduisent. J’aime leur flux chaotique jusqu’à la noyade. Des plus mignonnes aux plus inacceptables. Il y a tellement de choses à regarder, à copier, à modifier. J’espère, dans la foulée, abolir les lois qui protègent la propriété intellectuelle. Elles représentent une grave atteinte à la liberté d’expression de ceux qui revendiquent le droit de jouer avec les images, les sons et les idées qui nous entourent et nous excitent autant qu’elles nous harcèlent.
En gros il suffit de faire de l’art ?
Kiki Picasso: Plutôt du cirque. Je pense de plus en plus de mal de l’art. Il porte en lui trop d’ésotérisme élitiste. Il respecte la puissance, le génie, la perfection, la beauté, la valeur, l’unicité, le dépassement, l’efficacité. Au Cirque Electrique, on mène la paix sociale comme des acrobates. On emmerde l’excellence. On essaye toutes les méthodes, toutes les positions, toutes les idées, surtout pour ne pas se casser le cou. L’art ne prend que le risque de s’accrocher à un clou.
Du 7 au 15 novembre, Kiki Picasso et ses images vous invitent au Cirque Electrique, le chapiteau deviendra une salle de spectacle, une galerie, un atelier, un plateau de tournage, une régie vidéo, une salle de projection avec, en nocturne, plusieurs spectacles de « cirque laboratoire » où la place d’honneur sera laissée à  ses créatures, aux acrobates, aux danseuses, aux musiciens et au public. 

Ne manquez pas de vous y précipiter !
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